Il y a bien longtemps au début de ma carrière, j’avais du rétorquer « Et nous sommes en République » à un psychiatre qui se défendait d’appliquer les droits des malades. « Mais enfin, ici madame on est en psychiatrie ».
Les choses ont bien changé en psychiatrie (enfin, je l’espère) d’autant qu’on venait de loin.
Mais il y a encore, en médecine, des zones de non droit. Oh pas des zones cachées, des petites larcins, des 60 km/h en ville parce que les gendarmes sont occupés. Non. Des qui disent « Moi je roule à 100 km/h si je veux. Parce que je sais. Parce que j’ai fait beaucoup d’années d’études. »
Les mêmes qui expliquent que non, il ne faut pas appliquer la check-list au bloc opératoire, même si c’est recommandé par la Haute Autorité de Santé, et même si c’est prouvé que ça économiserait des milliers d’ « événements indésirables graves » comme on dit pudiquement (des morts et des blessés, quoi). J’entendais il y a quelques jours une conférence de la Haute Autorité de Santé et je me désolais de voir que les progrès de la sécurité des patients ne progressaient pas dans certains secteurs, du fait de telles résistances.
Je pense que ce sont les mêmes mécanismes à l’oeuvre chez ceux qui nous disent que non, même si la Loi l’exige, le consentement du patient c’est pas du tout nécessaire puisqu’on est des gars bien. Ces mécanismes qui font que l’on peut publiquement annoncer qu’on ne respecte pas la loi mais qu’on a raison parce que voilà.
Quand un médecin (reconnu) explique publiquement que son boulot consiste, non pas à adopter les pratiques qui ont fait leurs preuves au plan scientifique, non pas à appliquer les règles de droit définies par la représentation nationale, non…
En somme son rôle c’est de faire comme il veut puis nous expliquer combien c’est moderne.
Bien sûr les reco ne sont pas parfaites (et elles sont faites avec des professionnels), de même que l’éthique n’est pas une science exacte. Mais le médecin seul qui décide seul ce qu’il convient de faire, non par rapport aux référentiels de bonnes pratiques ou aux textes juridiques mais par rapport à son propre « flair » et sa propre appréhension du bien et du mal, ce médecin, tout habile qu’il soit techniquement, c’est un médecin totalitaire.
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